Témoins de Jéhovah

Histoire d'une vie ou descente aux enfers

(Source : site Web avec l'autorisation de Patrick)

26.12.2001
Quelquefois j'ai raconté l'histoire qui va suivre,
mais aujourd'hui elle prend toute la valeur qu'Anne aurait voulu lui donner.

* * *
Anne est une jeune fille de 17 ans, lorsqu'elle se marie.

Après avoir passé un diplôme de comptabilité, elle rencontre "l'homme de sa vie".
Architecte, beau garçon, brillant, généreux... Les qualificatifs lorsqu'elle parle de lui ne sont jamais adaptés dit-elle. Un beau mariage, naissance de deux petites filles... et la vie continue tranquillement. La construction d'une villa, piscine, etc., est pour elle l'occasion de montrer ses talents de comptable et de gestionnaire. Alors, en plus de tout ce qui précède, pourquoi ne pas faire un bureau dans la propriété ? Excellente idée. Ainsi elle pourra s'occuper sans trop de contraintes de ses deux enfants.

Les années s'écoulent, la situation florissante de l'entreprise fait qu'elle devient "une grande dame". Réceptions, invitations multiples... et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle sait recevoir ! Chaque invité repart avec "le" petit cadeau souvenir.

Puis quelques années plus tard, l'entreprise connaît des difficultés. Son mari revient de plus en plus tard "des rendez-vous d'affaires pour booster la société"... elle participe activement au "redressage" et de justesse, sauve l'entreprise qui est aussi un peu la sienne.

Hélas, la vie n'est pas un long fleuve tranquille... Une fois la société sortie de l'ornière, très vite Anne remarque des irrégularités comptables.

Elle comprend très vite ! Les week-ends "de travail" de son mari, s'appellent Amélia.
Étrange, mais celle-ci est l'une de ses meilleures amies... non, ce n'était pas possible, elle doit se tromper. La lettre, adressée à son mari dans la boite aux lettres, ce n'est pas d'Amélia... voyons, son amie d'enfance!

Habituée à ouvrir tout le courrier et bien qu'hésitante sentant le caractère personnel que contient cette lettre, elle décide de la mettre bien en vue sur le bureau pour la remettre à Marc, son époux lorsqu'il reviendra de Nice, mais sans l'ouvrir. Parmi les factures, les commandes, les autres rendez-vous sur Lyon, Paris, etc. Marc trouve "le" courrier. La réaction est immédiate "j'ai a te parlé. Ce soir, tu fais tes valises et tu t'en vas. Je demande le divorce. En attendant que tu trouves un logement (déjà trouvé par Monsieur!) je garde avec moi nos deux enfants et "on" verra après. "

Je passe sur les détails fastidieux d'une séparation très mal vécue car cela serait tomber dans le scabreux. Et c'est ici qu'en fait la véritable descente aux enfers commence.

Elle s'installe dans son studio, puis décidée à se battre avec la vie remonte la pente doucement, se fait de nouvelles connaissances, de nouveaux "amis", bref elle tient la tête hors de l'eau.

Jusqu'à ce dimanche matin fatidique ou deux messieurs, costume foncé, chemise blanche cravate sombre, un magnifique sourire, se présentent vers 10 heures au domicile d'Anne. A moitié endormie, suite à une soirée d'anniversaire, à la fatidique phrase "pouvons-nous rentrer, s'il vous plaît nous voudrions savoir ce que vous pensez... etc." Elle laisse entrer les envoyés du ciel. Dans le brouillard, elle leur demande quelques minutes pour s'habiller, et dans la foulée de leur leitmotiv elle se laisse aller à accepter de les revoir.

Je voyais et surtout j'avais souvent mon amie au téléphone. Chaque fois qu'elle se sentait mal. Souvent, et parfois tard la nuit, j'étais obligée de me déplacer simplement parce qu'elle avait "envie de parler". Des nuits sans sommeil, j'en ai connu... mais c'était une femme sur laquelle je commençais à me poser certaines questions. Plaisante-t-elle ? Est-ce réel ce qu'elle me raconte ?

"J'ai trouvé un but à ma vie, j'ai rencontré Dieu, je sais qui je suis maintenant... etc... "

A ce moment-là, je contacte l'une de ses deux filles, en lui précisant que leur mère ne va pas bien du tout et qu'il faut faire quelque chose pour elle, je ne peux plus tout assumer toute seule.

Un dimanche, j'invite mon amie a venir manger à la maison....."je ne peux pas je vais à une réunion d'informations pour avoir un complément de travail dans la semaine".

Bizarre tout cela.

Les mois passent, très peu d'appels, tout va bien, la vie est merveilleuse. Le dimanche elle part "se promener" en car, bref le bonheur.

Me rendant un matin chez elle malgré les kilomètres qui nous séparent et en arrivant devant son immeuble, je constate que ses volets sont fermés. La gardienne par chance se trouvant à discuter dehors, vient vers moi pour me dire bonjour (elle a l'habitude de voir ma voiture) et curieusement me dit Madame M... est partie de bonne heure ce matin, avec ses amis.. Tout est donc parfait.

Jusqu'à ce matin ou l'appel d'une voisine à qui j'ai laissé mes coordonnées m'indique au téléphone qu'il se passe des "choses bizarres", que des messieurs bien habillés (pas des huissiers de justice) viennent la voir depuis 3 semaines mais elle n'ouvre pas la porte. Inquiète, je décide de me rendre une nouvelle fois à son studio. Au moment de partir le téléphone sonne. C'est elle ! Contente elle me balbutie, qu'ils vont venir à 11 heures, qu'il faut que je l'aide "sa tante" n'étant pas là... elle souffre beaucoup. Je raccourcis la conversation lui disant que j'arrive de suite, le temps de faire les kilomètres qui nous séparent. "Fais vite... " voila sa dernière phrase.

Arrivée chez elle, devant son immeuble, voiture de pompiers, samu, police, etc. D'intuition je les avais appelés, et tant pis si c'était pour rien. Le chef des pompiers a qui le voisinage a indiqué que j'arrivais, vient très vite à ma voiture et me dit "elle ne veut pas ouvrir, elle ne répond pas... et pourtant il y a quelqu'un à l'intérieur. Nous allions défoncer les volets." Très vite je me précipite vers sa porte, tambourinant de toutes mes forces et puis je demande aux policiers présents de ne pas hésiter, de laisser les pompiers faire leur travail. La qualité de la porte blindée que je connais me fait leur dire "tant pis, fracassez ses volets, vous gagnerez du temps.". Cela prend quelques longues minutes, le monde commence à s'attrouper mais les volets ne résistent guère face à l'acharnement mis pour leur "ouverture". Afin de ne pas les gêner, je reste en arrière... Anne est transportée, après un examen rapide, toutes sirènes hurlantes à l'hôpital le plus proche. Elle est entre la vie et la mort.

Elle est sauvée, part en maison de repos et je retourne la chercher à Grasse 1 mois après. Le studio a été remis en état. Elle est contente de retrouver ses marques. Mais cela ne dure guère longtemps. Un dimanche matin, un nouvel appel alors là incompréhensible. Je repars de nouveau sur un trajet que je connais bien avec cette fois-ci ses clefs de maison, en pensant tout au long du chemin "pourvu qu'elle n'ait pas changé les serrures !". Je rentre une fois arrivée chez elle, éberluée devant le désordre et son état en lui demandant "mais qu'est-ce qui se passe enfin"... des photos d'elle bébé, de son mari .traînent par terre .. un fouillis incroyable. Pas un mot sortant de sa bouche n'est compréhensible... Je prends la décision de la lever du mieux que je peux en demandant de l'aide à un voisin qui n'hésite pas une seconde. Une bonne douche froide pendant qu'une nouvelle fois les pompiers sont appelés. Leur verdict ! "Une prise de médicaments limite, mais qui ne met pas ses jours en danger" Par prudence ils l'emmènent à l'hôpital 24 heures de surveillance, et voilà mon Anne de retour chez elle.
Mais là, je ne veux plus être l'amie compréhensive que l'on peut appeler à 2 heures du matin. Il faut que je sache POURQUOI !

Elle s'installe dans un silence étrange, que je mets sur le compte de la fatigue.

Puis, habituée à son appartement, je finissais par le connaître par coeur, mon regard est attiré par une étagère assez importante comportant une série de livres en cuir de couleur bleue marine. Je me lève pour en prendre un, trouvant que le cuir était très beau. Tout de suite je comprends de quoi il s'agit et son regard intensément fixe le mien. Je ne l'ouvre pas tout de suite. J'attends. Je sens que je vais prendre mes airs des mauvais jours, mais il ne faut pas que je la braque.
C'est "QUOI CA" lui demandai-je finalement... des livres (ce qui était évident) me dit-elle.
Le ton accablé qu'elle prend, me décide à jouer le jeu de "je ne sais pas ce que c'est, donc j'ouvre", au hasard...
Il s'agissait d'une collection de style encyclopédie. La, je sors de mes gonds afin de l'obliger à parler. Elle éclate en sanglots et me dit enfin "ce sont les livres des témoins de Jéhovah" !!
Enfin !
Elle m'explique qu'un matin un couple, lors de son retour de l'hôpital, est venu la voir lui parlant des bons et des méchants, etc., etc., etc. Qu'ils allaient l'aider en tant que "frères" et "soeurs" pour l'aider à sortir de sa détresse... etc.

Sur une petite table basse, un carnet de chèques bien en vue attend.

Mes questions fusent, OU ? QUAND ? COMMENT ? POURQUOI ?

OU, chez elle.. QUAND ? Un jour de la semaine ? Comment ? Simplement lorsqu'ils ont frappé à sa porte POURQUOI... parce qu'elle allait mal.

Alors elle a acheté des livres, puis... je fais grâce de la suite. Elle me demande de l'aider à se faire ré-hospitaliser en maison de repos avec l'accord du psychiatre qui l'avait suivi dans le midi et de son médecin traitant. Mais avant me précise-t-elle, il faudrait que tu acceptes de conserver mon carnet de chèque et que tu paies, après que je t'ai donné pouvoir à ma banque, tout ce qui est loyer, impôts etc.

La banque rouvrait le mardi. Étonnée, je prends donc son chéquier en lui précisant qu'il faut d'abord pointer ses comptes, après nous verrons. Elle se lève, et toute joyeuse, me sort un dossier et me dit "tout est là"..
Moi qui la croyais limite dans ses revenus, je m'aperçois qu'elle a touché quelques jours avant, un héritage de 750.000 francs d'un oncle qu'elle n'a connu que toute petite et dont elle n'a pour ainsi dire jamais eu de nouvelles!
Je coche avec elle, les chèques en attente. L'un me pose un problème. Elle a noté 350, mais il s'agissait d'un DERNIER chèque qu'elle avait fait aux TJS ?? Plus loin, je retrouve une somme de 25.000 francs sensés représenter la fameuse encyclopédie. Trop tard pour faire le nécessaire.

Par chance, elle a d'excellents rapports avec sa banque, et je lui demande de bien vouloir appeler, à son domicile, sa banquière pour qu'un rendez-vous soit pris pour le pointage du compte.

9 heures précises le lendemain, nous sommes dans les locaux de la banque, dans un bureau privé mais ou la directrice a un oeil sur la clientèle par le biais d'un système de sécurité écran. Reprise du compte, re-calculs, et... UN BOND mémorable de la directrice dans son fauteuil nous fait presque peur... je préfère me retirer dans la salle d'attente les laisse seules régler les problèmes.

Il y a du monde, les commerçants venant porter leurs recettes sont nombreux. Quelques petites minutes après ma sortie, un employé vient me dire Madame YYYYY vous attend. Sur un papier j'avais inscrit les écritures qui me paraissaient litigieuses et nous tombons d'accord avec son interlocutrice... Anne, prostrée dans son coin, blanche, ne dit plus un mot, clouée dans son fauteuil.

Un chèque de 350.000 francs figure au débit du compte et correspond au premier abord a celui de 350 qui avaient attiré mon attention. Il y a eu falsification. Sur celui-ci, "nous ne pouvons plus rien faire..".Hélas. La signature est bien la sienne. D'une toute petite voix, Anne à peine compréhensible pleure en silence, terrée dans son fauteuil... "je regrette, je regrette".. Par chance, une infirmerie se trouve dans les locaux, et la directrice décide de l'emmener afin que l'on s'occupe d'elle.

Quelques temps après, le téléphone sonne dans le petit bureau. Une autre banque téléphone pour "savoir si un chèque de 350.000 francs tirés sur le compte n° XXX au nom d'Anne, est approvisionné, un dépôt venant d'être fait." Très intelligemment, les deux collègues se mettent d'accord, mais pour "une telle somme il faut que le chèque soit déposé directement sur l'agence concernée et que le retrait puisse être fait sous une semaine sans problèmes". C'est un véritable coup de poker !!!!! Le piège va-t-il fonctionner ou NON ???? La directrice d'Anne accepte même, dans un moment de générosité extrême, de donner de son temps pour attendre les possesseurs du chèque et bla-bla-bla...

Les deux agences sont éloignées mais un lundi, il n'y a pas trop d'encombrements. Entrés dans la banque ENFIN, ceux que les policiers attendent patiemment dans une autre pièce ou l'on peut entendre les dialogues. Ce qu'il faut, c'est que le second chèque fasse l'objet de multiples vérifications afin de ne pas éveiller les soupçons, ET SURTOUT l'heure de fermeture étant passée que l'opération soit menée avec brio. C'est fait. Le chèque bloqué. Les protagonistes du "dépôt" emmenés en douceur pour interrogatoire.

Grâce au courage de cette directrice d'agence, de la complicité (pas tout à fait légale mais on ne s'en plaindra pas) de son collègue, la machine judiciaire a pu se mettre en route. Bien sur procès... très long... enquête, contre-enquête... puis à nouveau le départ dans un lieu secret de mon amie Anne, pétrifiée de peur et d'angoisse retombée dans une très grosse déprime.

Visites interdites. Mais, un beau jour, lors de sa première sortie autorisée un week-end, à la sortie de la clinique à la levée du portail... deux messieurs "bien sous tout rapport" réussissent à retrouver celle qui est devenue une véritable loque humaine. Je suis là, avec un infirmier et l'un de ses amis qu'elle a connus dans ''une salle qui n'a de royaume que le nom"... Ils veulent juste discuter... alors la douce Nelly descend de la voiture se plante devant les beaux messieurs, leur flanque une gifle magistrale... et leur joue un tour qu'ils ne connaissent pas.. Je reconnais, cela a du leur faire mal, mais quand les grands moyens s'imposent... on fait ce que l'on peut.!!

Pour écourter, Anne revient chez elle, et les contacts son rapprochés, pas toujours faciles lorsque l'on travaille.. mais...

Un dimanche matin, le téléphone d'Anne ne répond pas. Elle s'est suicidée. La veille je l'avais eu joviale, contente enfin d'avoir chassés tous ces démons, toutes ces craintes, la justice allait faire son travail.......

Une lettre déchirante repose sur cette petite table....."j'ai ruiné ma vie, "ils" m'ont tout pris, ma personnalité, ma sagesse, ma fierté et surtout ma liberté. J'ai décidé d'en finir. Je demande pardon à tous du mal que je vous ai donné. Ils m'ont appelé, d'autres vont revenir demain, je ne peux plus rien imposer à personne... etc."

Elle dort maintenant, dans une jolie petite maison, dans un joli petit cimetière, entourée de jolies fleurs, elle ne connaîtra pas HARMAGUEDON......
Sur sa petite maison on peut lire, "passants, vous qui regardez ma demeure une secte me l'a offerte, je ne me suis pas réveillé parce que la "Tour" ne m'a pas gardée".

C'est la dernière épitaphe offerte par ses deux filles qui l'avaient "oubliée." !

Sa fille, c'était moi disait-elle, nous avions une différence d'âge... et moi "sa fille de coeur" je n'ai pas vu le signal d'alarme... et je m'en veux...

Repose en paix Anne.


 


Sectes sur le Net francophone

Les Témoins de Jéhovah

Home Page
Sectes = danger !