Troisième Partie :

                   Des modèles pseudo scientifiques

 

 

 

sommaire

L'Etiologie d'une épidémie sociale par Patricia Crossman LCSW

 

 

*      Modèles Pseudo scientifiques :

 

Chaque philosophie ou méthode de traitement basée sur des modèles pseudo scientifiques traitant de la nature  du monde réel et l’esprit humain, peut logiquement conduire à un préjudice du patient et/ou une chute dans le mysticisme. En voici quelques exemples :

 

ü      Le modèle hydraulique et énergétique.

 

Au 19ème siècle la chaleur fut présumée être une substance qui coulait entre des choses la rendant chaude.  Une substance physique fut inventé ou érigé en principe avec ses propriétés propres. Ce modèle erroné, appliqué à la psychologie, suggéra que la structure humaine s’était construite à partir de l’énergie psychique. Cela fut utilisé à l’origine par Freud. Cela venait de la préoccupation du 19ème siècle et des machines à vapeur. La plupart de l’économie européenne dépendait de l’énergie à vapeur. La contrôler était l’enjeu pour les ingénieurs, et les explosions étaient un réel hasard et une source de réclamation des assurances.

 

Comme interprété par l’AT et la TA l’énergie psychique opérait de la même façon que la vapeur d’eau. Un liquide invisible à l’intérieur d’une personne pouvait la rendre damnée ou  refouler un traumatisme à un stade particulier de la petite enfance, aussi loin que la naissance ou la période périnatale. Ce traumatisme bloque le développement futur mieux qu’une constipation bloque une élimination saine ! L’énergie bloquée s’accumule et devient toxique et dangereuse. Elle peut-être réalisée par la Catharsis induite par une variétés de méthodes qui libèrent ainsi l’énergie.  Mais comment faire reculer de l’incidence de ce traumatisme ?

 

ü      Récapitulation

 

Selon ce modèle, l’horloge biologique peut-être inversée et le patient peut retourner vers cette voie où il était réellement, jusqu’à l’état de développement antérieur à ce traumatisme. Le traumatisme est revécu, puis ensuite le patient recommence son développement et dans certains cas « renaît ». Comment cela est-il possible ? (10 ).

 

ü      Régression

 

La régression implique un retour à un stade infantile ancien du développement. Elle est induite par l’hypnose (une vulgaire supercherie de magicien de scène), des visualisations guidées, le contact visuel forcé prolongé, l’épuisement, la terreur, ou l’humiliation. Sous cette mise sous influence le patient est persuadé de simuler. Il est supposer être dans la posture et de ressentir les émotions d’un petit enfant ou d’un bébé.  A ma connaissance, aucune étude de régressions sous hypnose n’a confirmée la réalisation d’une véritable régression à un stade infantile. L’une de mes amies, Marian Hallet, dit qu’au cours du programme des Schiff à Fredericksburg, en Virginie, elle simulait la régression pour éviter les punitions et une mort possible. Elle savait tout au long (de la « thérapie ») qu’elle jouait. Avec l’aide de la police elle put finalement s’échapper, bien que sévèrement effrayée (11). Les autres gamins simulaient aussi sur ordre pour gagner l’approbation et la confiance ou éviter la punition. Mais ils restaient car ils n’avaient nulle part où aller.

Les plus jeunes n’avaient pas de vie possible dans un monde extérieur à la structure construite par les Schiff. Dans l’acte de simulation la victime renonçait à ses défenses normales, aussi bien qu’à son langage adulte et à sa pensée critique. Il pouvait, et même souvent, il devait se laisser prendre au piège du psychodrame, et s’obliger à prolonger la mascarade jusqu’au bout.

 

Un juge qui a conduit quatre procès à Kansas City impliquant « reparentage » et « régression » dit, « Mes procès ont montré que cela prenait environ six sessions de « reparentage » pour commencer à obtenir un profond et envahissant changement de l’image personnelle, des affects (émotions ), de la cognition, et du comportement. » (12) Cela n’est pas la régression, c’est le début de la maladie.

 

ü      Le modèle enregistré sur magnétophone.

 

Selon ce modèle, chaque mémoire (incluant les expériences précédent la naissance) est enregistrée et approvisionnée quelque part dans le cerveau, ou dans d’autres cellules du corps comme « mémoire cellulaire ». Selon ma connaissance, ce modèle fit sa première infâme apparition en 1968 avec la publication du best-seller de l’analyse transactionnelle « Je suis OK, Tu es OK », par Tom Harris. Harris proclama que les expériences conduites par le neurochirurgien Wilder Penfield en 1950 avait révélé que « chaque chose qui avait été enregistrée en détail dans la partie consciente de notre conscience et qui se nichait dans notre cerveau était capable de rejouer le passé dans le présent » (13 )

 

ü      Maintenant, qui était Penfield ?

 

Wilder Penfield était un neurochirurgien canadien qui cherchait à soulager les crises grand-mal des épileptiques en appliquant une sonde électrique sur le lobe temporal du néo-cortex, où les « centres de tempêtes » étaient présumés se trouver. Il nota que dans certains cas les personnes au cours de la stimulation électrique relataient qu’elles pouvaient voir, entendre et se sentir dans un environnement qui leur semblait familier. Il présuma que cela était le témoin de la mémoire réelle. Cette mémoire allant ensuite ne nicher quelque part dans le cerveau. Il rapporta que dans certains cas les souvenirs étaient décrits comme oniriques et n’ayant pas de signification particulière.

 

En 1952, Penfield donna un symposium sur les « mécanismes de la mémoire » (14). Il fut bien accueilli et inclut trois neurologistes et un psychanalyste, Lawrence Kubie, protégé de Paul Federn (disciple de Freud) et ami notamment d’Eric Berne.

 

Les participants répondirent avec enthousiasme, mais non sans questions. Pourquoi l’odorat n’était-il pas gardé en mémoire, pourquoi le patient ne s’entendait-il pas parler ? Peut-être devrions-nous chercher à en savoir plus à propos du fonctionnement du cerveau plutôt que de sauter aveuglement sur des conclusions issues de simples hypothèses.

 

En dépit de ces réserves des autres participants, Kubie fut captivé. Il accepta sans se poser de question que Penfield avait prouvé que les mémoires étaient réelles et pouvaient être accessible dans un endroit physique. Avant de future expérimentation, Kubie créa une théorie de psychothérapie globale, où certains souvenirs étaient cachés et donc refoulés. Kubie dit, « cela a été gardé en moi comme un ferment de contrôle des pièces d’un puzzle tombé dans un endroit où nous réalisons que presque toutes les choses que nous connaissons à propos des procédés névrotiques, son étiologie, sa thérapie et sa prévention est apparenté au destin des souvenirs disparus. »

 

Ce fut un au revoir à toutes ces années de psychanalyse sur divan, avec sa dépendance au « mots » pour retrouver les souvenirs au cours d’une introspection thérapeutique. Désormais la perspective thérapeutique était la réalisation d’une intervention simple et rapide possible même avec Marcel Proust. Plutôt que de lire ces livres fleuves, Kubie proposait de mettre Proust sur la table d’opération. Oui, juste mettre le patient sur la table d’opération, prendre ses souvenirs, et les analyser ensuite, ou « faire des études préopératoires sur ce qui peut être délivré sous l’influence d’une variété de narcotiques et d’autres agents dissociatifs. » (15).

 

Kubie témoigna de ses découvertes à un Berne enthousiasmé. C’est ce que Berne attendait pour fournir des preuves « scientifiques » de l’hypothèse de la réalité historique des trois états du moi, Parent Adulte Enfant. Adieu le Sur-moi, le Moi et le Ca ! C’était « la psychanalyse du pauvre », un modèle « Ford T » pour prendre en charge la santé mentale et le bien-être relationnel des personnes ordinaires et de leurs enfants. Un « OK-ness » pour tous ! Le mouvement de l’analyse transactionnelle (TA) étaient en train de rouler, et juste à côté débutait le parcours de l’abominable « reparenter », Jacqui Schiff.

 

ü      Claude Steiner,

 

membre éminent et conseiller scientifique de l’ITAA, écrivit récemment dans un numéro du Bulletin d’Analyse Transactionnel (TA bulletin) :

« Sur l’aboutissement des neurosciences Berne fréquemment se référait aux conclusions de Penfield et de la stimulation de certaines parties du cerveau de sujets éveillés, vraisemblablement dans l’état de moi Adulte, réveillant les souvenirs vifs de la jeunesse. Se fondant sur cette information, Berne supposa que les deux états de moi, Adulte et Enfant, et plus tard le troisième qu’il appela le Parent, avait des représentations anatomiques spécifiques à l’intérieur du cerveau. » (16).

 

Je comprends que le Docteur Steiner est toujours en train de chercher le réseau neuronal des deux états de moi manquant !

 

Pourtant, les recherches ultérieures ont prouvées que Penfield avait tord. Ces flash-back (retour en arrière) rapportés étaient en réalité plutôt des rêves éveillés. Sur les 520 patients, seulement 40 produisirent « des réponses expérientielles ». Des études ultérieures montrèrent que de telles « réponses expérientielles » se produisaient uniquement quand la structure limbique, comprises comme étant essentielles pour les expériences émotionnelles, était activée, ainsi rempli de l’expérience d’une sensation d’une émotion familière « souvenue » (17). Le Dr Margaret Singer, qui avait observée les expériences de Penfield au cours de son cursus universitaire, me raconta dans une conversation personnelle, « Aucun de nous (les étudiants universitaires) pensait que ces effets n’étaient autre chose que des hallucinations » La mémoire est fluide et comme la personnalité subie des changements perpétuels. Cela peut se métamorphoser à chaque instant, en fonction des circonstances. Ce que Marcel Proust comprenait mieux que Lawrence Kubie !

 

ü      Catharsis.

 

Les praticiens AT pensent que l’expression de la fureur et de la colère refoulée à travers la catharsis devrait résulter d’une purification psychique. Freud revendiqua la première « cure cathartique ». Ce fut le cas de Anna O, qui fut « guérie » par son bienfaiteur et ami Joseph Breuer. Anna devint la tête d’affiche de la psychanalyse et représentée dans « Etude de l’Hystérie » (en 1895), un livre que Freud écrivit avec le très hésitant Dr Breuer. Pourquoi Breuer était-il hésitant ? Parce que, d’après son docteur, en fait, Anna O ne fut pas guérie de ses maux, qui plus probablement venaient d’une frustration due à une éducation rigide et un manque d’opportunité de la classe aristocratique féminine Juive viennoise, de l’épuisement en soins (NT : on parle maintenant de « Burn out ») qu’elle donnait à son père autoritaire à l’agonie et de la consternation de n avoir pas été écoutée sur la mort de celui-ci au cours des six semaines suivantes! Après une année où rien ne se passa, l’exaspéré Breuer déposa la misérable Anna O à l’hôpital local. Lors d’une très douloureuse névralgie faciale, elle développa en plus une addiction durable à la morphine. Le véritable nom d’Anna O était Bertha Pappenheim et s’étant soignée seule quelque temps plus tard, elle devint une très haute et estimée réformatrice sociale et humanitaire. Elle conduisit sa vie avec richesse, remplie de satisfactions, et fit des voyages dangereux aux Balkans pour secourir des enfants orphelins. Elle traduisit des textes Juifs anciens, et elle dit pour l’avoir observé que dans un monde plus rationnel les hommes devraient porter les enfants et les femmes écrire les lois ! Elle était bien connue pour son humour, dans ses fêtes et dîners une seule chose était interdite. C’était la psychanalyse ! (18).

 

La catharsis fut en fait la dernière lubie de la fin du 19ème siècle. Un livre populaire fut publié dans les années 1870 faisant revivre la vieille méthode mesmérique. Il suggérait la découverte du traumatisme originel par l’utilisation de narcotiques et son élimination par abréaction ! En fait, cela ressemblait aux rituels de purges et de saignées !

 

Maintenant pour la défense des Grecs qui s’étaient fait reprocher leur idée de « catharsis », il devait être dit que ce n’était pas ce qu’Aristote voulait dire lorsqu’il utilisait ce mot. Pour  Aristote, la « catharsis » décrivait la réponse de l’assistance aux drames de la Grèce ancienne. Cela signifiait l’effet humanisant de l’assistance à travers les émotions de pitié, de peur et finalement de résolution, à travers l’identification avec le protagoniste. Il est difficile d’imaginer une assistance de Grecs immobiles durant toute la production de Sophocle « Oedipus at colonus », avec rien à faire d’autre que de rester dans une profonde attention révérencieuse. Les scènes de violences n’étaient pas permises sur la scène. C’était l’espace sacré. La Catharsis a un petit lien avec la Grèce ancienne, comme le personnage de Freud Œdipe a quelque chose à voir avec l’homme de la grande histoire de Sophocle, qui est celle d’un bébé abandonné, et d’une forte colère ! Le sanglant étalage de violence dans le spectacle des gladiateurs des productions Romaines libérait les réactions, mais pas leur résolution. Ils voulaient juste encore plus de sang. Et comme le psychologue Carol Tavris l’a observé, des décharges excessives de colères ne font pas décroître la colère, mais en fait l’accroître. (19)

 

ü      Personnalités multiples

 

Les états de ce modèle où plusieurs alter ego ou entités peuvent habiter le corps humain, restent distinct et ignorent les autres. En Mai-Juin, 1998, The Skeptical Inquirer (L’information sceptique) publia un long et très bon article de recherche de August Piper Jr, un psychiatre, dont le sujet auquel il se référait alors était le Trouble dissociatif de l’Identité. Il écrit, «  Une épidémie de maladie psychiatrique s’élargit à travers le Nord de l’Amérique. Avant 1980 un total d’à peine plus de 200 cas avait été identifié à travers toute l’histoire connue de la psychiatrie. Encore aujourd’hui, quelques partisans de cette pathologie affirment qu’il atteint un dixième des américains. » (20 ) Le trouble des personnalités multiples fut la dernière lubie du 19ème siècle (une autre épidémie psychique ) qui émergea de l’hypnotisme. Quelques cures sensationnelles furent revendiquées. Ce fut par exemple le cas d’Elizabeth Beauchamp, qui fut « guérie » par Walter Franklin Prince. Ces cures réveillaient l’imagination de romanciers ou d’auteurs. Il fut aussi utilisé comme argument de défense dans certains cas criminels. Toutefois, en accord avec Henri Ellenberger, il y eut une réaction contre ce concept de multiple personnalité. Il fut allégué que les enquêteurs s’étaient fait duper par des patients mythomanes et qu’ils avaient involontairement déformés les manifestations qu’ils avaient observés (21).

 

 

 

ü      La diabolisation de la victime.

 

Le diable est dans l’enfant, même sous formes fantasmatiques chargées de haines dés ses premières semaines de vie, comme le suggérait Mélanie Klein, ou sous forme d’une colère explosive refoulée, telle que les praticiens AT voudraient nous le faire croire, ou sous forme des injonctions négatives de la « mère sorcière » de l’école d’analyse transactionnelle (TA). L’enfant est, en d’autres mots, possédé, et ainsi avec la force d’un super humain il est très dangereux, sans aucune caractéristique humaine excepté la colère et la haine. Lui/elle n’a ni empathie ni conscience. Seulement un moi enragé ! Tous les enfants atteints de RAD sont donc considérés comme des fous meurtriers potentiels. Une femme convaincue d’avoir battue à mort sa fille adoptive âgée de deux ans affirma initialement que c’était de l’autodéfense. La résistance était présumée être un effort délibéré et plein de force de la moins bonne partie du patient, exigeant ainsi une escalade dans le niveau des interventions, jusqu’à ce que les victimes craquent, se soumettent, ou meurent. Et depuis les enfants atteints de RAD, comme les « hébéphrènes » de Jacqui Schiff, ont été proclamés comme étant insensibles au mal, une douleur plus forte doit leur être appliquée.

 

Un « expert » AT dégénéré et ayant perdu sa licence, le Dr John Dicke, un ancien directeur clinique de l’Institut de Psychothérapie des Enfants et des Adolescents du Colorado, écrivit la lettre suivante dans un journal local à l’occasion de la mort de Candace et du procès des « thérapeutes » responsables :

« Sur beaucoup d’aspects Candace était « le diable » qui nous effrayait tous. Elle était destinée à une vie de misère et peut-être de toxicomane, vivant dans la rue ou en prison. A la place de l’homicide (Watkins et Ponder ) auraient pu être accusé de ne pas s’occuper  du cas de Candace Newmaker qui serait morte un  jour où son incapable mère l’aurait frappée (22 ). »

 

J’ai assistée à un atelier de deux jours à la fin 2000, quelques mois après la mort de Candace Newmaker. Il reçu l’approbation de Conseil Californien des Examinateurs de Science du Comportement, le Conseil Californien de l’attribution des licences d’exercice, et financé par l’Association Californienne de Thérapie par le Jeu. Il était prévu au départ pour être « Attachement et jeu en Thérapie ».

 

L’atelier coûtait 250$ et donnait droit à 13 unités de formation continue. Il était en fait une vitrine pour le Centre d’Attachement d’Evergreen et mettait en vedette Neil Feinberg, LCSW, thérapeute à Evergreen durant les dix sept dernières années et aussi collègue de Connel Watkins.  La totalité de l’événement fut grandement mis en scène. Les participants passaient à travers une pièce achalandée en jouets et au milieu de livres traitant du jeu en thérapie, du travail en bac à sable, et « Theraplay » (Thérapie par le jeu ) un autre mot pour Holding thérapie. Une fois à l’intérieur les participants étaient assis à des tables rondes. Sur ces tables étaient amoncelées du sucre, des bonbons, le sucre (comme le lactose du lait maternel ) était présumé être un facteur favorisant les relations. Une table avait été dressée comme un bac de sable et il fut demandé aux participants de mettre des « pierres de guérison » sur cet autel virtuel. Dans l’ensemble, l’événement avait une allure mystique.

 

Puis Feinberg commença. Le titre de sa conférence était « Parentage des enfants ayant un attachement désordonné à travers le Jeu en thérapie ». Evergreen, dit-il a soigné des enfants adoptés venus du monde entier, tous souffrant de RAD (Désordre Affectif Réactionnel), Désordre d’attachement, (RAD et ODD, etc.) et les troubles bipolaires. Les trois catégories pouvant être distinguées par la réaction des enfants à la prise de médicament tel le RISPERDAL® ou le ZYPREXA ® (mais pas le PROZAC ®). (NT : Le RISPERDAL ® et le ZYPREXA ® sont des neuroleptiques de dernière génération ayant pour indication le traitement de troubles psychotiques) Sa présentation fut rapide et bien préparée, comme une mise en scène de comédien, et beaucoup de personnes trouvèrent de bonne grâce de l’humour dans ce qu’il dit à propos des ces patients enfants. Ses plaisanteries étaient toujours aux frais de l’enfant ! Puis il démontra ses techniques effectives de « parentage », qui est, l’établissement d’un contrôle total de l’enfant, y compris sa « permission de respirer ». Plus que toute autre chose il insista sur la nature criminelle de tout enfant atteint d’un RAD et raconta des histoires horribles. Une «  famille reconnaissante », sans leur enfant, était là pour témoigner de leurs expériences.

 

Puis il nous fut montré trois vidéos, le premier des bébés ou des jeunes enfants dans un orphelinat Russe, ayant l’air morose. Puis vint deux vidéos montrant le déroulement de Theraplay. Ces vidéos étaient très inquiétantes. Dans l’une, un petit enfant asiatique d’environ sept ans clairement terrifié subissait la contention de Feinberg, qui frictionnait ses articulations sur les côtes de l’enfant et le chatouillait avec acharnement avec comme objectif de le stimuler. L’enfant devait ensuite faire le tour d’un cercle d’assistants, et exécuter un psychodrame en racontant l’existence vécue avec sa mère biologique. Il lui fut ordonné de crier à sa mère imaginaire : «  Comment pourrait-tu me donner la vie ? »

 

Une autre vidéo montra une fille durant ces cinq ans «de supervision ». Elle fut suivie partout avec une caméra vidéo, qui fut clairement angoissant pour l’enfant. Pendant que sa mère tournait le film, l’enfant finit par se blottir, en pleurs, la tête cachée. Quand je demandais ce qui était arrivé à cet enfant, Feinberg haussa les épaules et continua avec sa présentation. Quand je le questionnais à propos de la mort de Candace, il commenta seulement : « Terrible ce qui a pu lui arriver ! » Vraisemblablement il se référait à la mort de Candace. Mais il parlait de Watkins, pas de Candace ! Il dit qu’il avait travaillé avec Watkins et qu’elle était une excellente thérapeute. Il s’était aussi formé auprès de Jacqui Schiff. Quand je lui demandais s’il connaissait son livre « Ils sont devenus mes enfants », il dit, « Grand livre, mais nous ne les emmenons pas si loin. »

 

Le second jour était une « expérimentation » d’un rebirthing. L’instructeur était Lali Mitchell, MFCC, qui avait monté un programme de formation dans l’Expression par l’Art thérapie à l’Institut de la Montagne du Ciel à Escondido, Californie. (C’est à cet endroit que Douglas Gosney réalisa ces 300 rebirthings !) Mitchell enseigne la « conscience supérieure » et a un « Masters » en Programmation Neurolinguistique (P.N.L). (NT, pseudo diplôme reconnu par aucune autorité universitaire). Quoique cela se passe quelques mois après la mort de Candace, quand elle fut questionnée, elle affirma, qu’elle ne connaissait rien à propos de ce cas. « Quelle tristesse ! Le Rebirthing n’est pas si effrayant, » dit-elle, et il nous fut montré deux vidéos où était « joué » un rebirthing (NT, le terme « joué » est utilisé par les thérapeutes avec un contresens, il sous-entend que l’acte dit thérapeutique (qui est ici une torture), et une sorte de jeu de rôle, un jeu virtuel, mais les crimes sont toujours pour de vrai ! Les analystes transactionnels français évoquent la possibilité de jouer « au viol »). Un enfant à quatre pattes traversait un tube en grosse toile, ou mis dans un sac il devait bondir en dehors. La naissance réelle, dit-elle, fut le problème. Le bébé est conscient durant la naissance, et son traumatisme devient le modèle pour tous les autres traumatismes ultérieurs. Un bébé né par césarienne, par exemple, développera un manque d’initiative. (Comme Jules César, peut-être ?). Un bébé né d’une rupture développera une impulsivité. Le cordon autour du cou peut éventuellement mener au suicide. Puis nous avons visionné une vidéo d’un enfant de 4 ans jouant dans un bac à sable avec quelques jouets d’animaux. Cela nous fut expliqué comme représentant en fait sa vie dans un utérus toxique. L’utérus lui-même peut-être une place dangereuse. La seule solution est de rejouer tout le traumatisme aussi souvent que possible. Selon le Docteur William Emerson, l’expert du « traumatisme de naissance » les nouveaux-nés sont des « petits primitifs manipulateurs ».

 

Ainsi il fut demandé aux participants de fermer leurs yeux pendant que Mitchell décrivait la condition du bébé piégé dans un utérus toxique. Après cela,  il nous fut doucement demandé de visualiser l’expérience de nos propres naissances, ou en s’adressant  clairement aux femmes ayant eu un avortement, l’angoisse d’un fœtus qui sait qu’il est en train de mourir ! Il fut demandé aux participants de mouler de grosses masses froides dans de l’argile moite tout en poursuivant leur visualisation. Une musique fade était le fond sonore d’une pièce froide qui prenait un air mélancolique. Quelques personnes sanglotaient  silencieusement. Puis la lumière vint, des sucreries furent apportées et il nous fut demandé de partager nos expériences comme si nous mastiquions. Même si, je compris combien le présentateur était manipulateur, je senti mes larmes venir. Les facilitateurs étaient là, à portée de main pour nous réconforter. Les noms et les adresses électroniques furent échangées. Et ce fut tout.

 

Ce qui me choqua à ce moment fut qu’une seule personne, autre que moi, protesta sur qui c’était passé. Beaucoup apparurent remués et reconnaissant ! Il y avait environ 100 participants, majoritairement des femmes, des conseillers familiaux et conjugaux, dont quelques LCSWs (Travailleurs Sociaux ayant une licence de psychothérapeutes), et quelques un en formation et en supervision, qui étaient là sur la recommandation de leurs superviseurs.

 

La plupart travaillaient en connexion avec les services et les agences d’état en charge de l’adoption des enfants. Leurs réponses à ce séminaire étaient inquiétantes.

 

Il y avait des professionnels de la santé mentale. Ils apparaissaient comme n’étant pas encore conscient de la manipulation émotionnelle flagrante qui s’était déroulée. Plus inquiétant, ils n’avaient pas l’air affectés par la cruauté montrée sur ces vidéos le jour précédent, quoique certains aient été clairement remués par la vidéo de l’orphelinat Russe. Peut-être était-ce parce qu’ils avaient déjà diabolisés les enfants atteints de RAD comme cela leur avait été ordonné.

 

Etant curieuse à propos de la « renaissance » des enfants, je décidais d’assister à un atelier du rebirthing d’un enfant, celui-ci subventionné et approuvé par l’Association pour la Psychologie et la Santé Prénatale et Parentale, pour 5 points de crédits supplémentaires. L’atelier se déroulait à l’Hôtel Cathedral Hill dans le centre de San Francisco, où une conférence pour les sages-femmes se déroulait. Notre groupe était dans une pièce à part. Elle était ronde comme « le ventre d’une femme », du moins c’est ce que dirent les participants. Le présentateur était le psychologue William Emerson, un haut membre estimé de l’APPPH. Emerson avait monté un Institut à Petaluma  proposant des « Séminaires Emerson de Formations », dans beaucoup d’hôtels aux alentours de la région. Son entraînement incluait des régressions chez des « nourrissons, des enfants et des adultes, et aussi un travail sur ses fantômes et sa spiritualité ». Il travaillait avec un obstétricien de Caroline du Nord Bob Oliver, aussi membre du conseil de direction de l’AAPPPH. Emerson, comme Zaslow, qui avait étudié aussi la psychologie à l’école de San José dans les années 60, était persuadé que tout les malheurs humains étaient le résultat d’un traumatisme non résolu. Ce traumatisme non reconnu, et même refoulé, produit un fantôme qui trace la destinée de l’homme pour toute la vie. (Le terme de fantôme avait été piqué à Carl Jung). Donc, la meilleure chose est de démarrer la thérapie aussi tôt que possible avec les bébés, et même les nouveaux-nés. Ainsi Emerson formait ses étudiants à résoudre le traumatisme de la naissance chez les bébés, pratiquant sous sa supervision (surveillance).  Toutefois, avec l’ordre d’être capable de communiquer et de montrer de la compassion à des nourrissons subissant cette épreuve, les « trainees » doivent d’abord réaliser leurs propres séries de régressions, « la « régression » centrale étant le retour à la condition ultime. C’est l’étape qui précède la naissance, et qui heureusement signifie la fin de la destinée en créant le fantôme.

(NT : trainees=formés, NT, le terme trainee est le terme francisé conservé dans le vocabulaire des analystes transactionnels francophone)

 

Les ateliers d’Emerson contenaient plus que ces garnitures mystiques. Par certains côtés cela me rappelait la séance d’une sorte de réunion secrète. Il y avait environ 35 personnes, notamment un couple de chiropracteurs, des praticiens de la vie antérieure, et certains étudiants universitaires d’Emerson. Il nous parla du « champs de la pensée ». Les participants adhérèrent sans critique aux affirmations péremptoires d’Emerson. Cela étant accrédité par l’idée de la puissance du psychisme humain. Emerson lui même était superficiel, assez charmeur et fermement croyant en ce qu’il disait.  Plusieurs participants avaient déjà réalisés des régressions avec lui ou sous sa surveillance.  J’ai parlé avec un jeune homme anxieux qui avait déjà bénéficié de quatre régressions et qui n’avait pas encore pu se débarrasser de son fantôme. Il espérait de sa prochaine et probablement dernière régression. Après quoi il serait capable de travailler lui-même avec des bébés. Il parlait avec enthousiasme du cas d’un nourrisson de 5 mois, qui criait et tapait du pied pendant une demi-heure, au cours de la « thérapie ».

 

La présentation continua avec Bob Oliver, l’associé d’Emerson, un obstétricien affable qui affirmait être capable de parler avec des nouveaux-nés et de diagnostiquer leurs traumatismes de naissances que ceux-ci lui racontaient. Dés lors que les enfants ne peuvent parler, cela signifie donc que Bob Oliver est doué de… télépathie ! Les traumatismes de la naissance doivent être immédiatement reformatés normalement par la reconstitution d’un conduit traumatique de la naissance avec la douleur reproduite par manipulation manuelle (« les petits primitifs »),  . Le bébé pleure et lutte. Puis ensuite, l’épreuve est suivit pendant au moins dix minutes de contact oculaire forcé. A la fin de tout cela, le bébé a maîtrisé seulement un seul traumatisme. Ils peuvent en avoir vécu d’autres. Des séances supplémentaires sont alors nécessaires. Il y a des vidéos de ces procédures, accompagnés des témoignages de parents reconnaissants. Une jeune maman dit qu’elle avait peur que son bébé soit possédé, parce qu’il criait beaucoup trop !

Dans un cas d’utérus toxique, il y avait une femme qui avait fumé des cigarettes pendant la grossesse, Emerson et Oliver tous deux recommandèrent ce qu’ils appelaient une « solution homéopathique », la pose d’une pièce de gaze trempée de nicotine sur l’ombilic du nouveau-né !

 

Tout est fait pour produire une nouvelle existence spirituelle ! De fait, les bébés subissant cette thérapie sont décrit comme des pionniers dans la quête spirituelle de la production d’un enfant libéré de son traumatisme, obéissant, non agressif, et ayant peut-être la capacité de créer de jolies aquarelles de nos images intérieures en forme d’ombre indigo. Adieu science, ceci est une nouvelle religion ! (NT : on peut traduire par « nouveau mouvement religieux » par nécessité de coller à la réalité des débats sur les religions et la liberté de croyances).

 

Peut-être est une descente dans une marée de gadoue noire prédite par Freud, une descente au cœur de l’obscurité.

 

Les questions furent encouragées. J’interrogeais à propos de la mort de Candace. Emerson dit que Watkins avait été trop loin ; sinon c’était une excellente thérapeute. Puis quelqu’un dit que Candace n’avait pas été tuée, elle avait juste décidée de quitter son corps. Il y eu un accord général là dessus. Emerson dit qu’il lui avait été donné une mission spirituelle, c'est-à-dire de guérir le traumatisme de la naissance, par son gourou spirituel, Swani Mukdananda, qui avait été introduit aux Etats-Unis durant les années 1970 par Werner Erhart, et qui avait une ashram à Oakland, Californie. (10 ans environ plut tôt Swani décida de quitter son corps suite à une accusation pour avoir molester un enfant)

(NT : Swani Mukdananda a aussi l’orthographe suivante Muktananda. Il est à l’origine en France du mouvement Siddha Shiva Yoga, selon sa biographie Il quitte le monde en pleine conscience le 2 octobre 1982. )

A la fin de l’atelier, j’eu la chance de parler avec Emerson et Oliver autour d’un verre « social ». Tous les deux avaient été impressionné par mon vieil ami Eric Berne. Emerson connaissait aussi Jacqui Schiff. Toutefois, il semblait plus impressionné par le travail de l’une de ses disciples, Pam Levin, une infirmière formatrice de l’ITAA (Association Internationale d’Analyse Transactionnelle) qui propose une « régression centrale douce » dans l’Ukiah en Californie. John Bradshaw (animateur d’une ancienne émission de télévision très connue) recommanda le travail de Levin dans l’un de ses livres. Bob Oliver séjourna à Poona en Inde, dans la fin des années 1970 avec Bhagwan Rajneesh, à qui il exprima sa grande admiration.

*      Références

 

10. Margaret Thaler Singer and Jana Laic, Les therapies follies. Quelles sont-elles? Marchent-elles ? 

Crazy Therapies: What Are They? Do They Work, 1996, pp. 23-45

11. Marian Hallet, Manuscrit non encore publié.

12. Ibid.

13. Thomas Harris, MD, I'M OK-YOU'RE OK, 1967, pp. 25-33

14. Wilder Penfield, "Mécanismes de la Mémoire," Archives of Neurology and Psychiatry, 1952, pp. 178-198

15. Ibid.

16. Claude M. Steiner, "The Adult: Once More with Feeling," Transactional Analysis Journal, January 2002, pp 62-65.

17. Israel Rosenfield, The Invention of Memory: A New View of the Brain, 1988, pp. 167-170 L’intervention de la mémoire: une nouvelle vision du cerveau

18. Henri Ellenberger, The Discovery of the Unconscious, 1970, pp. 481-484; Frederick Crews, Unauthorized Freud, 1998, pp. 11-50. NT: Le livre noir de la psychanalyse de Catherine Meyer reprend l’analyse de Frédéric Crews.

http://www.arenes.fr/livres/fiche-livre.php?numero_livre=119

19. Carol Tavris, The Mismeasure of Woman, 1992.

20. August Piper, Jr., "Multiple Personality Disorder: Witchcraft Survives in the Twentieth Century," Skeptical Inquirer, May-June, 1998; August Piper, Hoax and Reality: the Bizarre World of Multiple Personality Disorder, 1997.

21. Henri Ellenberger, The Discovery of the Unconscious, 1970, pp. 131-141. La découverte de l’inconscient.

22. Jean Mercer, Larry Sarner and Linda Rosa, op. cit., discuss the demonization of the victim/patient (p. 61). Discussion à propos de la diabolisation des victimes/patients.

 

 

Les autres parties :

Introduction

L'Etiologie d'une épidémie sociale par Patricia Crossman LCSW

Première partie - La mort de Candace Newmaker

Deuxième partie - Cathexis et Analyse Transactionnelle.

Troisième partie - Modèles Pseudo scientifiques

Quatrième partie - Analyse transactionnelle théorie et organisation

 

 

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