Conseils aux proches d'adeptes d'une secte

(Source: Colloque de L'AVCS, à Bruxelles le 29 octobre 1999)

I - Les conseils

Ne vous culpabilisez pas
N'essayez pas de convaincre l'adepte
Gardez le lien sous une forme ou une autre
Posez vos limites
Préparez la sortie
N'hésitez pas à demander de l'aide

II - Les étapes à franchir pour retrouver une vie normale

Le conditionnement
Les phobies
Le temps
Les proches "à l'extérieur"
Les proches "à l'intérieur"


I - Les Conseils

Ne vous culpabilisez pas ! Le seul coupable est le gourou. En vous culpabilisant, il se peut que vous cherchiez à vous sentir moins impuissant. Ou encore, à trouver un sens à ce qui vous paraît n'en avoir aucun. Ce serait. de votre part, une attitude compréhensible. Mais le conditionnement sectaire est tel que votre culpabilité le renforce. Si vous vous remettez en question, cela ne doit pas être en terme de faute passée, mais de relation présente et future avec l'adepte. En général, la famille est le groupe d'appartenance le plus fort qu'ait connu l'adepte, donc le plus à même de l'aider. Il est important qu'elle évalue puis transforme son fonctionnement interne, afin que ses membres se sentent mieux entre eux, et l'adepte avec eux. Dans ce cas, le moment venu. il trouvera plus facilement la force de quitter la secte pour rejoindre les siens. Aucune famille n'est parfaite. Que l'entrée en secte de l'adepte soit pour sa famille une occasion d'assainir les relations entre ses membres !

N'essayez pas de convaincre l'adepte ! Plus vous argumenterez contre la secte, plus vous convaincrez l'adepte que la secte a raison. C'est un effet paradoxal du conditionnement sectaire qui est difficile à comprendre, mais fondamental. De toute façon, l'essentiel n'est pas dans les croyances éventuellement bizarres du groupe, mais dans l'emprise que ce dernier exerce sur l'adepte. Une façon de s'y retrouver, c'est d'imaginer l'adepte coupé en deux : d'une part l'ancienne identité (Moi-famille) qui entend les émotions de ses proches, mais est incapable de leur répondre, et d'autre part la nouvelle identité (Moi-secte) qui entend les arguments de ses proches, mais les interprète comme une agression à son égard, et répond par sa mauvaise foi, voire par une agressivité qui peut dégénérer en rupture. Ne prononcez surtout pas le mot « secte ».

Gardez le lien sous une forme ou une autre ! Le mot : "secte"  soit sonne faux, soit est plus ou moins désagréable à fréquenter, mais il ne faut pas se décourager. Il faut parler à l'adepte dans un langage propre à renforcer les liens familiaux, même si on a l'impression de ne pas être entendu. On dit parfois qu'il ne faut pas parler à l'adepte des choses désagréables. Mais une fois de plus, aucune famille n'est parfaite. Faire semblant que tout va bien, c'est tomber dans le même travers que la secte. il faut tâcher d'être le plus vrai possible. A l'opposé de la perfection, il y a la chaleur. A l'opposé des discours sur l'amour et de la charité obligée, il y a le foyer familial. On peut même verser des larmes, du moment que cela ne devient pas un moyen de pression. Dans une secte, tout est prétexte à faire pression. Si vous vous engagez dans un bras de fer, premièrement vous ferez le même geste que la secte (et contribuerez donc au conditionnement), deuxièmement vous perdrez ! Parlez à l'adepte du passé que vous avez en commun avec lui. Proposez-lui des projets correspondant à ses anciens pôles d'intérêts.

Posez vos limites ! Pour l'adepte, les lois de la secte l'emportent sur les lois de la société. Il peut même dans certains cas être amené à commettre des infractions en parfaite inconscience. Comment lui faire respecter les règles de la vie en société sans que votre intervention paraisse agressive ? Ne lui faites jamais la morale ! Il pense être plus moral que vous. Et puis, essayer de le culpabiliser, c'est essayer de faire pression, Par contre, vous pouvez très bien lui dire que vous n'êtes pas d'accord avec quelque chose, tout en précisant que cela n'entame en rien l'amour que vous lui portez, De façon plus générale, ne perdez pas de vue que la vie continue, qu'il n'est pas nécessaire de la faire tourner autour de l'adepte, si fort que soit votre désir de l'aider. Ne lui donnez pas d'argent.

Préparez la sortie ! A sa sortie de la secte, l'ex-adepte a besoin de trois sortes de renseignements : a) sur l'emprise au sens large, et au sens sectaire, b) sur les coulisses de la secte dont il sort, et c) sur ce qui s'est passé pour ses proches pendant qu'il était sous emprise. Le temps sectaire est un temps d'éternelle répétition des mêmes actes et des mêmes émotions. Il faut aider l'ex-adepte à retrouver le mouvement de son histoire. Un bon moyen est de lui donner à lire un compte-rendu des observations que vous avez faites de lui pendant qu'il était dans la secte. Ses changements d'attitudes et de comportements. Quelques conversations qui vous ont frappé. Les indices qui vous ont convaincu qu'il était sous emprise. L'évolution de vos relations avec lui. Des anecdotes familiales dont il aurait raté le déroulement du fait qu'il était en secte. Etc.

N'hésitez pas à demander de l'aide ! Vous vivez un problème très particulier, pour lequel vos solutions habituelles sont probablement mises en échec. Beaucoup de personnes dans votre situation s'enferment dans une solitude honteuse. Il ne faut pas, Choisissez ceux de vos proches qui sont suffisamment pondérés pour ne pas « rentrer dans le lard » de l'adepte, et partagez votre secret : il sera moins lourd. N'hésitez pas à consulter des aidants professionnels. Essayez de rencontrer des personnes dans une situation semblable à la vôtre, ainsi que des ex-adeptes. Il ne faut pas perdre l'espoir, ni la patience !


II Les étapes à franchir pour retrouver une vie « normale »


Pour un «-adepte, et a fortiori pour un couple ou une famille d'ex-adeptes, il n'est pas toujours facile de retrouver une vie « normale » :

Le conditionnement : Il leur reste un certain nombre d'automatismes de pensées et de comportements susceptibles de les mettre en porte-à-faux vis-à-vis de gens qui n'ont pas vécu la même expérience. Y compris, d'ailleurs, vis-à-vis des « professionnels de la santé mentale » qu'ils pourraient être amenés à consulter, si ceux-ci ne croient pas à la possibilité de la manipulation mentale.

Les phobies : Il peut leur rester une ou des phobies tenaces qu'il convient de débloquer avec les autres automatismes, en remontant à leur source. Précisons qu'il est impossible de changer la personnalité de quelqu'un... Par manipulation mentale, il faut entendre une modification de la perception du monde. Ce type de modification peut s'inverser assez rapidement, à condition de trouver la clé. Dans la plupart des cas, lire l'un ou l'autre livre sur les techniques de manipulation et/ou sur le groupe sectaire considéré peut suffire. Rencontrer d'autres ex-adeptes peut s'avérer indispensable. Il n'y a pas de honte à demander de l'aide à des intervenants spécialisés.

Le temps : Pendant qu'ils étaient « en secte », le cours normal de leur histoire s'est interrompu. Il leur faut se réinsérer dans une histoire qui n'est ni ce qu'elle était au moment de l'interruption, ni évidemment l'histoire dans le groupe sectaire. C'est toute une reconstruction, qui demande beaucoup de créativité. à la fois pour faire la synthèse et potentialiser tous les possibles, et pour faire le deuil de ce qui serait devenu impossible. Il leur faut, entre autres, remplir l'immense vide laissé dans leurs loisirs, aussi bien que dans leur vie spirituelle, ou encore dans leur tissu relationnel, etc.

Les proches « à l'extérieur » : Il leur faut affronter les proches qui auraient été blessés par l'épisode sectaire, dépasser la culpabilité (inutile aussi bien qu'injustifiée) pour arriver à une position responsable, c'est-à-dire prendre sur soi de réparer ce qui peut l'être, et tirer le positif de son expérience. Cette étape est souvent la plus difficile, en ce sens qu'elle réclame énormément d'énergie à des personnes qui souvent, sont déçues, déprimées, fatiguées, etc.

Les proches « à l'intérieur » : Il reste le problème des proches qu'on laisse derrière soi dans le groupe sectaire, et avec lesquels, trop souvent, le contact devient difficile, voire se rompt. Il convient de déterminer ce qui est le plus important, de l'affection qu'on a gardé vis-à-vis d'eux, et de la haine qu'on a développé pour le système dans lequel ils sont pris. Il arrive régulièrement que la rupture ne soit pas imputable au désir de l'adepte ou à une manoeuvre du groupe, mais à la colère qui se développe de part et d'autre, du fait de comportements « anti-sectes ». Ceci dit, il ne faut pas tomber dans l'excès contraire consistant à nier qu'il y ait un problème.



Comment discerner les sectes ?

Home Page
Sectes = danger !