Cultes et sectes sataniques

" Eviter aux ados de se laisser piéger "

(Source : Extrait de : " Sectes, gourous, etc. " Dominique Biton, Albin Michel, avril 2003)

Sommaire

Diableries et jeux dangereux
Comment le diable vient aux enfants
Le filon du satanisme
Une mode qui peut leur coûter cher
Où en est-on en France?
Quand on franchit la ligne rouge...
Marylin Manson, rock star ou gourou ?
Conclusion


Diableries et jeux dangereux

A priori, rien ne distingue un groupe sectaire d'une bande de copains comme les autres, si ce n'est la dérive insidieuse qui conduit un jour ses membres à s'oublier totalement en tant qu'individus et à devenir de vaillants petits soldats de " la cause " prêts à suivre leur chef quoi qu'il puisse leur en coûter. C'est cela être embrigadé : on construit soi-même les barreaux de sa prison, au nom d'un idéal, d'un amour qui finit par aveugler au point qu'on renonce à sa liberté. Certaines communautés échappent ainsi à la classification de sectes parce qu'elles ne réunissent que quelques membres autour d'une ou plusieurs, personnes. Souvent, elles ne possèdent pas de forme juridique, ne sont ni des associations déclarées ni des sociétés répertoriées dont on pourrait contrôler les activités. Elles n'en sont pas moins prêtes à exercer de fortes pressions sur leurs membres dissidents ou éventuels détracteurs pour les empêcher de porter plainte contre elles. Ainsi, même si on les suspecte d'agissements attentatoires aux libertés et/ou à la dignité de la personne, on n'a pas toujours les moyens de le prouver, ce qui rend très délicat, dans les faits, l'ouverture d'une action judiciaire.
Il est donc essentiel d'évoquer le danger particulier que représentent pour les mineurs certaines mouvances ou familles de pensée pas nécessairement épinglées comme sectes, mais dont les dérives constatées inquiètent les pouvoirs publics. Parmi celles-ci, le satanisme est sans doute celle qui pose le plus de problème car ses gourous agissent dans l'ombre, le plus souvent à la tête de petites communautés informelles de quelques adeptes seulement, et sont d'autant plus difficiles à infiltrer par les agents des Renseignements généraux chargés de surveiller les groupes à risques qu'elles fonctionnent rarement en organisations structurées.

Comment le diable vient aux enfants

" Quand on entre là-dedans on a un grand pouvoir, or je n'en avais jamais eu avant. Et puis, il y a tellement de religions, laquelle faut-il croire 1 ? "
Ces quelques mots d'une jeune Américaine adepte du mouvement Wicca, cercle international d'apprenties sorcières au teint livide et toutes vêtues de noir, en disent long sur l'attrait que revêt actuellement auprès des jeunes le courant sataniste. Wicca à lui seul, qui n'en est que l'une des expressions, et pas la plus dangereuse, rassemblerait déjà entre 50 000 et 100 000 adeptes dans les pays anglo-saxons, et près de 3 millions dans le monde. Mais la référence au satanisme n'est pas seulement l'apanage de groupes d'obédience panthéiste comme Wicca, qui prône des recettes de grand-mère plus ou moins farfelues, empruntées à l'iconographie d'une sorcellerie " bon enfant ", proche de la nature, inspirée des mythes et légendes celtiques et somme toute assez inoffensive sur le fond en dépit de ses extravagances de forme.

1. Témoignage diffusé en octobre 2001 sur la chaîne du câble 13e rue.
Sous un label fourre-tout qui provoque d'autant plus d'intérêt chez les adolescents qu'il se présente comme une marque de subversion, le satanisme inspire malheureusement aussi des corpuscules d'autant moins fréquentables qu'ils sont difficilement contrôlables tant qu'il n'ont pas fait parler d'eux sur le plan légal, alors qu'ils n'en sont pas moins manipulés par des pervers aux comportements et thèses très dangereux. En France, ce courant commence lui aussi à faire beaucoup de " fans ", à la faveur d'une mode dont les dérives peuvent s'avérer dramatiques, quand elle devient le prétexte à des comportements imbéciles, pis, à des actes délictuels voire criminels comme des profanations de cimetières, messes noires, actes de barbarie sur animaux, voire tortures sur d'autres êtres humains. Pourquoi de tels dérapages ? Parce que, là comme ailleurs, des gens sans scrupule surfent sur les idées en vogue pour les récupérer leur profit, entraînant derrière eux les personnes qui commettent l'erreur de les suivre aveuglement.


Le filon du satanisme

Dès la nuit des temps, et surtout à partir du Moyen Âge, des hommes et des femmes ont secrètement vénéré Satan, quitte à finir brûlés en place publique ! Le culte de Lucifer, vieux comme le monde, n'est donc pas un phénomène récent. Ce qui est nouveau, en revanche, c'est que cette " anti-religion " s'affiche maintenant comme une mode, une référence qui donne l'air " branché ". Elle est donc devenue depuis quelques années un juteux fonds de commerce... Un seul exemple : la veuve d'Anton La Vey auteur d'une bible démoniaque qui fit sa fortune aux États-Unis dans les années 1970, a repris en main les affaires florissantes de son époux... Aujourd'hui considérée comme la grande papesse du satanisme, elle gère désormais en vraie femme d'affaires, la très prospère Église de Satan laquelle propose tout un tas de services clés en mains aux suppôts du diable, des messes noires aux funérailles à grand apparat, avec blasphèmes à volonté, sacrifices d'animaux et sensations fortes garanties! À la ville, la veuve La Vey est pourtant une dame tout ce qu'il y a de plus conformiste. Ses brushings sont impeccables et ses tailleurs pastel, très bcbg. Pas de scarifications, de teint livide ni de fards violets chez cette grand-mère de la bonne société américaine, qui démontre une façon de vivre des plus conservatrices, un goût et un respect certains pour le traditionnel. S'il y a visiblement ici tromperie sur la marchandise, le business dans ce cadre précis ne semble pas trop porter à conséquence... Tant qu'on parle de recherche vestimentaire, de musique, de, cinéma ou de littérature, bref, d'une " tendance" qui plaît follement et rapporte beaucoup, on n'a d'ailleurs rien à dire sur le fond. Bien des jeunes gens, y compris en France, l'ont déjà adoptée. Ils s'habillent exclusivement en noir, se maquillent en violet, n'écoutent que du rock satanique, type Darkness Enhrud ou Marylin Manson, ne lisent que BD et fanzines démoniaques... Tout le monde aime jouer à se faire peur, il n'y a rien de bien méchant à cela, et cultiver le goût de la provocation est quelque chose d'assez normal, à leur âge. On peut toujours se dire, pour se consoler, que la recherche du grand frisson, si elle n'est qu'une question de " marque ", leur passera aussi vite que leur envie de se payer des Nike...

Une mode qui peut leur coûter cher

Le problème, c'est quand, sous couvert de satanisme, on fait vibrer chez eux leur sens de la révolte, leur curiosité naturelle pour le bizarre et le paranormal avec l'objectif de leur fourguer, outre des produits de consommation payés au prix fort... des idées beaucoup moins "consommables " et parfois contraires à leurs propres intérêts. Qu'ils soient le fait d'un petit chef de bande ou d'une vedette du star-system, certains appels à la transgression dépassent les limites de l'acceptable. Quand par exemple on encense le règne du sang jusqu'à prôner le meurtre, l'automutilation, ou le suicide ; qu'on insuffle des pensées morbides, sources d'angoisse et de confusion mentale ; qu'on encourage à pratiquer des rituels et bizutages dégradants, qu'on se répand en slogans " racistes " et propos pédophiles... Il faut donc se montrer attentif aux discours ou changements d'attitude des enfants qui adoptent brutalement des thèses radicales, faire preuve de vigilance s'ils s'emballent soudain pour quelque jeux de rôle ou night-club luciférien, dans leur ville ou leur région. Ils n'y rencontreront pas forcément que des amis souhaitant juste s'amuser ou danser dans un cadre un peu original... Là plus qu'ailleurs sans doute, la prudence sera de mise. On ne peut non plus accepter sans réagir de voir un adolescent transformer peu à peu sa chambre en chapelle démoniaque ou en salle d'armes. Échanger régulièrement avec " ceux de sa bande " des fanzines d'extrême-droite type Napalm Rock ou Deo occidi. Afficher sur ses murs des sigles aussi douteux que des enseignes nazies, des emblèmes gore ou autres icônes sanguinolentes sous prétexte de collectionner rien que " pour le fun " de " drôles " ou "saisissantes " images. Tant que leurs enfants vivent sous leur toit, les parents doivent pouvoir et savoir leur expliquer que leur liberté s'arrête là où commence la violation de certains principes d'éthique sur lesquels ils ne transigeront pas. Prendre le temps d'en parler en famille est une première étape. La seconde, tout aussi importante, consiste à chercher l'explication de ces soudaines fascinations morbides qui peuvent, à un moment donné, pousser le jeune en question à se mettre ainsi en péril, au moins sur le plan moral et psychologique. Une simple conversation, menée avec subtilité et surtout sans jamais le heurter de front, peut parfois suffire à lui faire renoncer à sa nouvelle lubie ; à lui faire " entendre " les dangers concrets qu'elle comporte : risques de dérapage, de déviances et de transgressions multiples sous couvert de manipulation. Mais si le malaise s'avère plus profond, et s'il est impossible d'engager à ce sujet un dialogue serein et dépassionné, l'inciter en douceur à consulter un tiers pourra l'aider, avant qu'il ne soit trop tard, à mettre du sens sur ce qui peut poser problème dans sa vie.

Où en est-on en France?

En France, le courant existe de manière sporadique, heureusement beaucoup moins actif qu'aux États-Unis où l'Église de Satan et le Temple de Seth comptent des dizaines de milliers d'activistes, et possèdent de luxueux sièges officiels, d'où ils mènent leurs activités éditoriales et commerciales au grand jour. Dans notre pays, si quelques organisations connues sont étroitement surveillées, nombre de groupes informels sévissent au sein d'une nébuleuse très difficile à circonscrire par les pouvoirs publics. Souvent liés à des mouvements d'extrême-droite, ils fréquentent les concerts de trash, rock gothique ou metalhead, possèdent leurs propres sites sur Internet, s'échangent des informations via des fanzines et BD spécialisées type Napalm Rock, Succubus, Les Chroniques de la lune noire, 666 ante demonium, La Morsure(1). Ces groupes qui recrutent souvent leurs fidèles par le bouche à oreille dans les night-clubs ou lors de soirées privées, jouent sur une certaine fascination des adolescents pour tout ce qui touche au morbide, à la transgression sexuelle ou sociale. Ils sont souvent extrêmement dangereux et exercent une très grande violence à l'égard des adeptes qui veulent rompre avec eux, violence qui peut aller des menaces verbales aux agressions physiques, ce qui rend plus difficiles d'éventuelles actions judiciaires, les victimes, jugées "traîtres" au mouvement, hésitant toujours à porter plainte contre leur ancien groupe. Pourtant, ainsi que le souligne Paul Ariès dans son livre, notre pays n'est évidemment pas à l'abri du pouvoir de nuisance des satanistes comme le démontre le triste record des profanations de sépultures détenu par la France depuis plusieurs années...

1. Cité par Paul Ariès dans Le Retour du diable, éd. Golias, 1997.

Quand on franchit la ligne rouge...

Dans son enquête consacrée aux réseaux sataniques, le journaliste Gilles Rof donne quelques exemples assez éloquents des dérapages commis ces dernières années au nom du diable : en 1990, dans la région de Marseille, un jeune dealer se faisant appeler " Bélial " se fait arrêter par la police. Avec trois adolescents, il s'adonnait à des rites sexuels dans les cimetières les nuits de pleine lune et y organisait des festins de viande crue. Leur fanzine luciférien était diffusé dans toute l'Europe. En 1996, un jeune homme, grand amateur de rock et de rituels satanistes, assassine un prêtre en Alsace de trente-trois coups de couteau. La même année, à Aix, on arrête le dirigeant et les membres d'un réseau de jeunes qui dérobaient des morceaux de cadavres dans les tombes. L'année suivante, trois profanateurs de cimetières, membres d'un " ordre" satanique, proche d'un groupuscule néo-nazi, sont appréhendés. En Norvège, où le courant "black metal " est très en vogue, plusieurs églises ont été incendiées par des
musiciens de groupes satanistes1...

Marylin Manson, rock star ou gourou ?

Aux Etats-Unis, le chanteur rock Marylin Manson clame sa dévotion pour le satanisme et fascine les foules par son apparence démoniaque. "Bienvenue dans mon univers noir", crie-t-il à son public, qu'il arrive littéralement à subjuguer. Manson tient un vrai discours de gourou et ne s'en cache pas : " Entre nos fans et nous, c'est, une relation spirituelle ", clame-t-il haut et fort devant ses détracteurs. Sur scène, il pousse à son extrême le jeu de la provocation en prônant le culte de la douleur. Il y multiplie aussi les appels à la violence, au sexe sans tabous et à la drogue, mais tempère évidemment ses propos devant les adultes qui lui reprochent son inconscience : " En créant une idée nous espérons que les ados feront la part des choses ", se dédouane-t-il ainsi à bon compte. Pas question, bien sûr, d'interdire à nos enfants d'aimer Manson, s'ils en sont fans ! Mais leur suggérer de garder toujours en tête ce conseil de bon sens cueilli de la bouche même de leur idole, ne peut que les aider à prendre un certain recul dans l'expression de leur admiration et leur aspiration à lui ressembler...
Si l'on en croit son invitation à faire la part des choses, la star en représentation se prête d'ailleurs à des jeux de rôle qui n'augurent en rien de ses comportements dans la vie de tous les jours.

Conclusion

Malheureusement cet écueil n'est pas réservé qu'aux seuls gourous du satanisme. Bien d'autres manipulateurs exigent de leurs fidèles une soumission totale aux préceptes qu'ils sont censés défendre, même lorsqu'ils sont contraires à la dignité humaine, aux droits de la personne et aux libertés fondamentales... Des formes de dérive sectaire particulièrement redoutables quand elles sont le fait de quelques illuminés encore méconnus des forces de police et qui agissent dans le cadre d'une communauté non structurée, d'une bande, voire d'un simple groupe d'amis.

1. Marseille l'hebdo, 7 juin 2001.


 
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