Sectes et liberté religieuse en France

(source: Bulles n°70, 1er trimestre 2001)

Sectes et liberté religieuse en France - Un faux débat ?
Sectes et nouveaux mouvements religieux -
Un malentendu soigneusement entretenu
Le cadre dans lequel s'exerce la liberté religieuse en France
Pourquoi alors une telle polémique ?
Les compagnons de route
Que peut faire la loi ?
Le fond de l'affaire
Les responsabilités
Conclusion




 Sectes et liberté religieuse en France - Un faux débat

Il ne se passe pas de semaine où, ici ou là, ne soit organisé un colloque ou un séminaire sur " la liberté religieuse (et les risques qu'elle court actuellement ) en France ". Les organisateurs, souvent bien intentionnés, mais pas toujours, savent que le sujet préoccupe beaucoup de personnes et d'organismes, bref que le sujet est à l'ordre du jour. Et, curieusement, ces colloques et séminaires rassemblent immanquablement des défenseurs de " nouveaux mouvements religieux " (appelés encore, selon les auteurs et les publications, " associations religieuses et spirituelles " ou " minorités religieuses "), avocats, professeurs, sociologues et historiens des religions, voire clercs, qui tentent invariablement de les faire tourner en faveur de la défense et illustration de ceux ci, qui, d'après eux, sont les premiers concernés par la vague d'inquisition et de persécution contre la liberté religieuse qui balayerait la France tel un ouragan mauvais. Il ne se passe pas non plus de semaines où ne soient diffusés des pamphlets alarmistes et vengeurs, voire haineux, de gens qui hurlent à la persécution, comparant la France d'aujourd'hui à l'Allemagne des années 30 et 40 et la Constitution et la loi françaises à la férule du totalitarisme nazi.

On se frotte les yeux ; on n'en croit pas ses oreilles. Quoi, la liberté religieuse est si en danger que cela ? Quoi, la douce France renoue avec les dragonnades (le mot a été employé) et avec la Sainte Inquisition, avec la " police de l'esprit ", pourquoi pas avec les pogroms ? Que se passe t il donc dans ce pays pour que l'inquiétude d'une reprise des persécutions soit aussi vive chez certains ? Qui sont donc les coupables de cette infamie ? Où est la " bête immonde " qui détruit la liberté de conscience ?
Pourtant, à la réflexion, on n'a jamais entendu, et cela depuis un bon nombre d'années, quelqu'un se plaindre qu'il ait été empêché d'aller à l'église, au temple, à la synagogue ou à la mosquée, ni d'ailleurs d'enseigner le catéchisme, la Tora ou le Coran. Jamais les responsables des religions ne se sont plaints d'une quelconque discrimination à leur égard. Alors, que se passe t il donc ? Les " anciens mouvements religieux " seraient laissés tranquilles, et
les " nouveaux " seraient martyrisés ? Curieux pays où ce qui est nouveau serait ainsi systématiquement combattu.

 Sectes et "Nouveaux Mouvements Religieux" Un malentendu soigneusement entretenu

Non, apparemment, ce pays ne combat pas systématiquement tout ce qui est nouveau dans le domaine religieux. Non, il n'y a pas de dragonnades version XXIème siècle, pas plus que de pogroms ou de persécutions, et encore moins de martyrs pour leur foi. Si cela était, cela se saurait... Alors, encore une fois, que se passe t il?
Les sectes, dont on trouvera ci après quelques définitions, adorent, on le sait, s'autoproclamer " nouveaux mouvements religieux ", même si par ailleurs elles n'ont rien de commun, de près ni de loin avec ce que l'on appelle communément " religion ". Mais on verra que, en fait, la vraie question n'est pas là. La réponse est donnée dans les définitions qui suivent.

Les deux premières émanent d'organismes officiels. Elles sont reprises ici en raison du fait qu'elles sont destinées à servir de références, malgré quelques mises au point nécessaires, semble t il, pour couvrir totalement le champ visé.
L'une a été donnée par la Mission Interministérielle de Lutte contre les Sectes (MILS) dans son premier rapport annuel, en janvier 2000
"La secte est une association de structure totalitaire, déclarant ou non des objectifs religieux, dont le comportement porte atteinte aux Droits de l'Homme et à l'équilibre social".

L'autre, très intéressante également, émane de la loi belge du 2 juin 1998, dans son article 2:
"Pour l'application de la présente loi, on entend par organisation sectaire nuisible, tout groupement à vocation philosophique ou religieuse, ou se prétendant tel, qui, dans son organisation ou sa pratique, se livre à des activités illégales, dommageables, nuit aux individus ou à la société ou porte atteinte à la dignité humaine".

Il existe bien d'autres définitions, notamment celle donnée dans le rapport de la commission d'enquête parlementaire publié en janvier 1996. Toutes définissent les sectes par la nuisance de leurs comportements, lesquels portent gravement atteinte aux droits et à la dignité de l'homme, et à l'équilibre de la société.

On donnera ici l'une des définitions retenues par l'UNADFI, qui figure dans le numéro 36 de BULLES (4ème trimestre 1992, page 3), intitulée " Les critères de l'UNADFI "
"Pour l'UNADFI, une secte est un groupe où, à partir d'une situation de séduction, on cherche à obtenir de l'adepte une adhésion inconditionnelle et définitive. Pour y parvenir, on pratique, à son insu, une manipulation mentale (viol psychique) qui aboutit à une modification profonde de sa personnalité et de ses comportements sociaux. Pour le maintenir dans le groupe, on exerce ensuite des pressions de toute nature. Les propositions du groupe, séduisantes en apparence, reposent en fait sur une tromperie multiforme (intellectuelle, morale, financière). De tels agissements peuvent aboutir à la destruction de la personne et de la famille. Ils représentent également une menace pour la société démocratique. Il s'agit d'un réel danger ".'

Le père Jacques Trouslard a donné, dans le n° 48 de BULLES, une description très complète de la secte qui peut se résumer autour des trois caractéristiques nocives essentielles suivantes

Une triple technique perverse d'endoctrinement: technique cognitive, comportementale et affective.
Une triple destruction : destruction de la personne, de la famille et de la société.
Une triple escroquerie : escroquerie intellectuelle, morale et financière.

Citons aussi la description qu'ont fait des sectes le Tribunal et la Cour d'Appel de Lyon lors du procès de la Scientologie dans les années 1990:
" Emploi de manoeuvres frauduleuses, promesses, menaces, abus d'autorité ou de pouvoir, machination ou artifices, utilisation de techniques de conditionnement ou de contrainte morale, qui provoquent chez les adeptes une situation de faiblesse, de vulnérabilité, de dépendance et de complicité... ".
Pas une de ces définitions ne porte de jugement négatif sur les éventuels aspects religieux, ou non, de la secte. Cela est parfaitement normal, car cet aspect n'est pas, justement, une caractéristique du phénomène sectaire. La secte est une fabrique de dépendance.
Ainsi, les sectes, en se plaignant d'être persécutées en tant que mouvements religieux, déplacent systématiquement et sciemment le débat sur ce qui ne fait pas partie de ce qui les caractérise, c'est à dire leur éventuel côté religieux... Ce faisant, elles cherchent à rameuter à leur secours beaucoup de braves gens ignorants de leur réelle nature, ainsi que des personnes pas ignorantes du tout qui, avec ou sans leur aide, font profession de les défendre. Et le tour est joué

la France persécute de bonnes religions qui ont la fâcheuse idée d'être " nouvelles ", mais qui n'ont rien à se reprocher. On les persécute en tant que religion, ce qui est contraire à tous les accords internationaux sur les droits de l'homme et tout ce qui s'ensuit.
Immense tromperie et machiavélique imposture !

 Le cadre dans lequel s'exerce la liberté religieuse en France

Ces sectes veulent qu'on les considère comme d'authentiques religions et le clament à qui veut l'entendre. Que dire alors de ces groupes, qui font des pieds et des mains pour se faire " reconnaître " comme de vraies religions? Dans la mesure où l'on pourrait effectivement les considérer comme telles, en quoi consiste la liberté ou la non liberté purement religieuse pour elles ?
La réponse est simple : la Constitution de la République, la loi du 9 décembre 1905 et les textes subséquents définissent le cadre dans lequel s'exerce la liberté religieuse dans l'Etat laïc français. Qu'est ce alors qu'un mouvement religieux en France? C'est un mouvement qui répond aux dispositions de la loi de 1905, à savoir qui essentiellement exerce un culte.

La loi ne définit pas la notion de culte de manière explicite, et c'est dommage. Y a t il des sectes qui exercent un culte au sens de la loi de 1905 ? La réponse est: Non. La seule exception connue à cette question consiste en quelques rares cas isolés de dégrèvements de taxe foncière pour quelques " salles du royaume " des Témoins de Jéhovah. En toute rigueur administrative, ces "salles du Royaume" sont donc concernées localement par la loi du 9 décembre 1905, en tant que religion, qu'elles se rattachent ou non à un groupe sectaire.

La loi du 9 décembre 1905, par ses articles 1 et 2, assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes, sous réserves de dispositions précises qui y figurent, visant " l'intérêt de l'ordre public ". L'Etat ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucune religion. Le principe fondamental de la Constitution, qui institue la laïcité de la République, (Réf. : BULLES n° 63, 3è` trimestre 1999, pages 3 à 5), est en effet que tout citoyen, et toute organisation quelle qu'elle soit, fut elle religieuse, est soumise aux lois, à toutes les lois, de la République.

On sait que dans les pays anglo saxons, notamment aux Etats Unis, il n'en est pas tout à fait de même, et que la liberté d'exercice de rites ou d'obligations religieuses est parfois considérée comme d'un degré de légitimité supérieur à celui de la loi.
Cette situation n'est pas celle de la France, où d'ailleurs elle serait pratiquement incompréhensible, ni en fait d'autres pays européens notamment, où le respect absolu, et par tous les citoyens, de la loi constitue le ciment fondamental et la condition nécessaire de la cohésion républicaine.

S'il y avait persécution religieuse par les autorités de l'Etat, pourquoi donc, et au nom de quoi, celle ci ne viserait elle que les " nouveaux " mouvements religieux, et pas les " anciens " ? La loi est claire, et connue de tous en matière de libertés, et ni le législateur ni la Justice ne peuvent transiger sur son application par tous sans exception. Il n'y a dans cette évidence aucune tendance intolérante ou persécutrice ...Aussi, est ce à tort que les sectes se révoltent si certaines de leurs pratiques, qu'elles qualifient de " religieuses ", ne sont pas autorisées, ou font l'objet de plaintes, à partir du moment où elles sont en contradiction avec la loi. Il ne s'agit là que de l'application simple du droit commun, et cela n'a rien à voir avec le caractère sectaire ou non de l'organisation qui en est l'objet. Un mouvement religieux authentique peut présenter une dérive sectaire; il n'en reste pas moins religieux. Le caractère religieux ou non d'un mouvement tient à sa croyance, et au culte qui en découle ; le caractère sectaire tient à des comportements contraires aux droits et à la dignité de l'homme.

Mais ne nous y trompons pas. Les croyances, les philosophies, les pratiques, les "cultes" des sectes qui proclament leur caractère soi disant "religieux", ne sont pas religieux au sens de la loi de 1905, nous l'avons vu. Même s'ils l'étaient, cela ne changerait strictement rien au fait que ceux et celles de ces croyances, philosophies, pratiques et "cultes" qui sont contraires à la Constitution et à la loi, ou qui bafouent ou violent les droits et la dignité de l'Homme, ne peuvent en aucun cas être tolérés, et doivent être combattus. C'est d'abord aux responsables du respect de la Loi qu'il appartient de sanctionner ce type d'actes et de la faire respecter. Ce n'est pas parce que l'on enseigne aux adeptes l'exploitation de la sexualité dès le plus jeune âge, ou que l'on interdit la transfusion sanguine, ou encore que l'on sépare systématiquement les enfants de leurs parents, ou que l'on professe et pratique toute autre prescription illégale et les sectes sont là dessus très fécondes, tout cela en prétendant qu'il s'agit d'actes religieux que la loi ne s'impose pas aux auteurs de ces actes comme à tout le monde. De plus, on sait que ces pratiques font des victimes, nombreuses et souvent irrémédiablement détruites, parmi les adeptes et leur famille. Ces victimes doivent être défendues, soutenues et aidées, et les pratiques en cause dénoncées vigoureusement et sans relâche. Quand de plus s'y ajoute un comportement sectaire caractérisé, au sens des définitions qui précèdent, tout, croyances, philosophies, pratiques, cultes et comportements sont évidemment à dénoncer et à combattre, tant par les pouvoirs publics responsables que, pour leur part, par les associations telles que l'UNADFI.

 Pourquoi alors une telle polémique ?

Parce que le vrai débat sur les sectes, que celles ci et leurs défenseurs s'échinent à escamoter, n'est pas, on l'a vu, du domaine des religions. Leur intérêt est de se poser en victimes, puisqu'elles sont combattues. Se battre sur
leurs comportements et leurs objectifs ? Ce serait la déroute assurée.
Alors, leur reste, en dépit de la loi, le domaine religieux. Elles foncent tête baissée dans la brèche, en détournant le débat sur les aspects religieux, en affirmant contre toute vraisemblance que c'est en tant que religions qu'elles
sont combattues et persécutées, au mépris de la loi française et des accords internationaux. Elles ne font pas dans le détail, certaines d'entre elles affirmant par exemple que tous les groupes figurant dans la liste de 173 groupes réputés sectaires donnée par le rapport parlementaire de 1995 sont des " nouveaux mouvements religieux ", ce qui est parfaitement absurde.
Leur stratégie en la matière est simple : elle consiste à contraindre l'interlocuteur à venir discuter sur le terrain qu'elles ont choisi elles mêmes, même s'il n'est pas très sûr et même si ce n'est pas le vrai terrain du débat. Ainsi, en le forçant à discuter de liberté religieuse, on évite le vrai débat, celui relatif à la nature même du phénomène sectaire, et on tente de culpabiliser l'interlocuteur
Cette esquive du vrai débat est assez efficace, puisqu'elle arrive à tromper son monde, y compris certaines instances internationales très officielles, souvent efficacement noyautées à dessein, telles que l'O SCE ou la Fédération d'Helsinki et même le très pointilleux " Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor " du Département d'Etat du gouvernement des Etats Unis, lequel publie depuis deux ans des rapports très critiques sur l'attitude jugée inquisitoriale, intolérante et persécutrice, et donc contraire aux droits de l'homme, des autorités françaises à l'égard des " nouveaux mouvements religieux "

 Les compagnons de route

Mais les sectes ne sont pas les seules à avoir intérêt à fausser le débat. Leurs défenseurs sont, par exemple ceux des libertaires que révulse la moindre idée de restriction à la liberté sans limite, mais surtout ceux qui ont, d'une
façon ou d'une autre, partie liée avec elles. Ils pratiquent la même stratégie, ayant tout intérêt à présenter les sectes comme des victimes d'un honteux et incompréhensible ostracisme antireligieux de la part des autorités, tout en escamotant naturellement la vraie raison de l'attitude de celles ci. Cela permet des effets de manche grandioses où l'hypocrisie le dispute à la mauvaise foi. Cela permet de plus à certains d'entre eux de défendre indirectement d'autres intérêts minoritaires auxquels ils sont attachés, en un combat qui amalgame des minorités disparates dans un objectif commun de reconnaissance officielle.
Il y a plus grave : ces laudateurs des sectes ont des alliés objectifs, donc involontaires parmi ceux qui n'ont pas la conscience tout à fait tranquille à cet égard. Parmi ceux là on relève notamment des responsables de religions parfaitement connues et honorables, qui entretiennent parfois dans leurs flancs des groupes audacieux, souvent marginaux, mais parfois au contraire bien près du centre, difficilement contrôlables et gênants, parce qu'ils déploient à l'occasion des moyens typiquement sectaires ou parce qu'ils dérivent vers des comportements de cette nature, et par lesquels le scandale peut arriver sans crier gare...
Dans ce cas, il leur faut veiller au grain et les défendre vis à vis de l'extérieur, quitte à régler leurs problèmes en interne. On prend alors la défense des " nouveaux mouvements religieux " et des expériences plus ou moins osées, en passant sous silence, voire en défendant, là aussi, s'il le faut, des aspects inadmissibles de comportements, qui, à la limite, sont traités comme péchés de jeunesse. Si une telle attitude peut à la rigueur s'expliquer en tant que moyen de protection, pas excellent certes, mais pas tout à fait nul, elle présente un inconvénient majeur : en effet, le seul fait que cette manière volontairement aveugle de traiter ce problème soit employée par des organisations religieuses éminemment respectables autorise les sectes à s'appuyer sur elles pour se glisser par assimilation derrière le rideau de fumée ainsi vertueusement tendu. Ce faisant, leur but est de créer la plus grande confusion dans les esprits, confusion qui finalement nuit gravement à l'image des grandes religions, contrairement à ce qu'espèrent ceux de leurs défenseurs qui ont choisi ce moyen de protection. C'est ainsi que l'on voit même des sectes notoires prendre hypocritement la défense des Ordres monastiques chrétiens, en laissant entendre qu'ils emploient les mêmes méthodes manipulatrices qu'elles mêmes. Le courage et l'honnêteté, ne seraient ils pas alors pour les religions " historiques " de reconnaître franchement les éventuelles dérives et de les combattre au grand jour sans arrière pensée ?

 Que peut faire la loi ?

Les mêmes alliés objectifs des défenseurs des sectes se satisferaient d'une situation où n'existerait aucune loi spécifique sur les nuisances des sectes.
Sur ce point, l'évêque de Soissons a donné une réponse magistrale à propos de l'Église catholique. Il a écrit ce qui suit, sujet de la proposition de loi qui vient d'être votée par l'Assemblée Nationale le 30 mai dernier " tendant à
renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales " (Ref.: BULLES n° 67 3è` trimestre 2000) :
" L Église catholique ne peut que se réjouir du vote de cette loi. Il est en effet nécessaire de protéger par la loi les personnes, les familles, la société, les religions elles mêmes. Trop de sectes, en effet, violent impunément les libertés fondamentales et la dignité humaine. L Église catholique n'a pas à craindre cette loi qui ne veut en aucun cas porter atteinte aux religions et aux croyances. D'autre part, le "Droit canonique " de l Église catholique attache une importance capitale au respect des libertés tant dans les ordres religieux que dans la vie ordinaire des communautés chrétiennes. Le respect des consciences et des libertés n'est il pas au coeur de l'Évangile du Christ, venu pour libérer et servir la dignité sacrée de toute personne humaine ? Droits de l'homme et vie chrétienne vécue dans la vérité sont inséparables. "
La hiérarchie de l'Église Catholique semble être de plus en plus consciente du problème sectaire et prendre les dispositions nécessaires contre les dérives (voir encadré en fin d'article).
Le détournement du débat est hélas facilité par l'état de la législation en matière de religions. En effet, comme il est indiqué plus haut, la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'État, qui est le texte fondamental en la matière, si elle définit très clairement les rapports entre les Eglises et l'État, ne donne aucune définition des religions. Tout juste parle telle de " cultes ", sans non plus définir cette notion. C'est ce flou de la loi sur un point aussi sensible qui autorise toutes les interprétations, ce dont ne se privent pas les sectes, certaines n'hésitant pas par exemple à se baptiser " religion athée ". N'importe quelle philosophie, aussi légère ou absurde soit elle, et quels que soient ses procédés et agissements, peut s'autoproclamer religion sans que personne puisse se référer à un texte faisant autorité pour le contredire.
De là à appeler " nouveau mouvement religieux " tout et n'importe quoi, il n'y a qu'un pas que les sectes et leurs encenseurs franchissent allègrement, on l'a vu, ajoutant ainsi volontairement à la confusion générale, au bénéfice de la tromperie systématique dont elles font leur ordinaire.

 Le fond de l'affaire

Rien de tout ce qui est évoqué plus haut n'est innocent. Des enjeux très importants sont cachés derrière la vertueuse référence aux droits de l'homme invoquée à tout bout de champ par les sectes et leurs défenseurs.
Il y va tout simplement de leur survie, car la couverture religieuse est le seul moyen de défense qui a des chances de paraître plausible auprès de l'ignorant des réalités sectaires, et parce qu'elles ne peuvent vivre que dans et par la tromperie, voire l'escroquerie
tromperie au recrutement,

- tromperie sur les objectifs réels,
- tromperie sur la " doctrine ",
tromperie sur les besoins financiers,
- tromperie sur l'emploi des ressources fnancières,
- tromperie sur l'avenir personnel des adeptes,
- tromperie sur le caractère " religieux " de la secte,
- tromperie vis à vis de la société.

Que la vérité éclate, voici les sectes désarçonnées. D'où cet acharnement à vouloir se faire reconnaître comme religions, afin de devenir intouchables... D'où cet acharnement à lutter contre tout ce qui, de près ou de loin, tend à les remettre à leur vraie place, parmi les groupes néfastes pour les individus, les familles et la société... D'où cet acharnement à déplacer sans cesse le débat pour l'empêtrer dans des marécages éloignés de leurs pratiques répréhensibles. Et puis, la religion, cela permet de bénéficier d'exonérations fiscales intéressantes... Comme le dit Jean Louis SCHLEGEL, dans un article intitulé " Les sectes à l'âge démocratique "
" l'opposition est donc, avant tout, entre sectes et sociétés démocratiques, et non pas entre sectes et Eglises ':

 Les responsabilités

Les premiers responsables de cette situation sont évidemment les sectes elles mêmes, ce qui n'a rien d'étonnant. Non seulement elles savent manier la tromperie et le mensonge dans leurs paroles et leurs écrits, mais, de manière beaucoup plus subtile et efficace, elles savent fort bien infiltrer et noyauter les structures et instances où se prennent des décisions et où se préparent rapports et résolutions. Les structures les plus ouvertes démocratiquement sont de ce point de vue les plus vulnérables. Ainsi fleurissent dans les instances internationales ou nationales, aux Etats Unis particulièrement, des ONG patronnées et financées par des " nouveaux mouvements religieux " bien connus.
Parmi les responsables de cette situation, figurent aussi les " supporters " des sectes. II ne s'agit pas là de personnes isolées, dont la bonne foi aurait été trompée par la faconde de quelques hérauts convaincants. II s'agit des mêmes que ceux que l'on retrouve dans les colloques évoqués en introduction sur la " liberté religieuse " en France : intellectuels, historiens et sociologues des religions, professeurs, avocats. Ces " spécialistes " des sectes, qu'ils soient convaincus ou complices, vous servent doctement leur vision des choses, en usant et en abusant au besoin de leur position dans la société. Ils vous démontrent, en prétendant recourir dans leur analyse à la méthode scientifique, que les sectes ne présentent aucun danger, qu'elles sont persécutées, en tant que religions naturellement, et que s'il y a quelques dérives chez certaines d'entre elles, elles sont le fait de cas isolés, regrettables, certes, mais facilement corrigibles et n'entamant en rien la respectabilité de la secte. Ils les analysent comme on contemplerait un décor de théâtre, sans s'occuper ni de la pièce qui s'y joue ni de ce qui se passe dans les coulisses, en se limitant à la description de leur façade, c'est à dire sur la manière dont elles présentent leur doctrine, leurs rites et leur culte, et par là en escamotant l'essentiel, à savoir l'observation directe de ce qu'elles sont en réalité, de leurs objectifs fondamentaux, et de ce qu'elles font concrètement. Faire l'impasse totale sur une observation de cette importance tout en prétendant faire oeuvre scientifique est tout simplement se moquer du monde.
La méthode scientifique d'analyse d'une question est une astreinte rigoureuse nécessitant d'abord et avant tout d'identifier et de nommer tous les aspects sous lesquels elle se présente, puis à observer et étudier chacun de ces aspects, et enfin de tenter une synthèse (réf : BULLES no 53). Ces " spécialistes " rendent un très mauvais service à la méthode scientifique, en la violant délibérément. Ce n'est pas ainsi qu'ils la feront progresser, ni du reste qu'ils acquerront une quelconque crédibilité auprès des vrais scientifiques.
Ne parlons pas de ceux qui sont animés de la seule volonté de nuire. L'invective est leur principal argument, et ils cultivent essentiellement la diffamation et la contrevérité. Ce serait leur faire trop d'honneur que de parler de leurs méthodes d'action.

 Conclusion

Le tableau présenté ci dessus a pour objectif de replacer dans son cadre réel le phénomène sectaire en regard des religions. Ce qui est écrit là a déjà été écrit maintes et maintes fois, sous une forme ou sous une autre, par des personnes particulièrement autorisées. Et pourtant, on a l'impression que rien n'y fait. Les mêmes hypocrisies, les mêmes mensonges, continuent, et continueront sans doute, à être proférés par les mêmes voix, indéfiniment, car leurs auteurs savent qu'à force de répéter une affirmation, même notoirement fausse, on achève d'ébranler les convictions les plus ancrées. N'en doutons pas : leur objectif est bien d'arriver à pénétrer dans le pré carré honorable et fiscalement intéressant des religions, si possible par la grande porte. Certains y croient. Hélas, ils n'ont objectivement pas tort, puisqu'il existe des précédents à l'étranger, même tout près de chez nous. Nous voilà donc prévenus. C'est pourquoi tout acte délictueux doit relever des juridictions civiles, les lois de la République s'appliquant à tous.

L'Eglise Catholique reconnaît (dans un article très remarqué du bulletin SNOP du 15 janvier 2001 signé de Monseigneur Vernette, Secrétaire du Service National " Pastorale et Sectes ") qu'il lui arrive de constater des dérives sectaires dans certains des groupes qui se réclament d'elle, ou même qui sont reconnus officiellement. L'auteur déclare que les difficultés causées par ces dérives, difficultés qu'il ne nie pas, doivent trouver le plus souvent leur solution dans le cadre des structures et règles administratives et judiciaires de l'autorité ecclésiale, en particulier par un recours plus systématique aux dispositions du Code de droit canonique. Ce pas en avant dans une prise de conscience ainsi clairement affirmée méritait d'être souligné.